La cinquième édition du SIJM se termine aujourd'hui. J'y suis à titre professionnel, Beenox m'ayant envoyé sur place afin de parfaire mes connaissances en tant que concepteur de jeu. Avis aux curieux, voici mon horaire pour la deuxième journée! Vous pourriez venir y faire votre tour!
La deuxième journée du sommet débutera sous le signe de la controverse, avec une conférence intitulée "Grand Theft Childhood? Quelques données réelles sur les jeux vidéo et la violence" et animée par Cheryl Olson et Lawrence Kutner, les codirecteurs du Centre pour la santé mentale et les médias de l'Hôpital général du Massachusett, qui ont signé le livre "Grand Theft Childhood: The Surprising Truth About Violent Video Games and What Parents Can Do". Voilà qui promet d'être très intéressant.
Ensuite, j'hésite à me rendre à une table ronde portant sur la création de jeux ayant une signification ou un message social positif ou à une conférence portant sur la direction artistique du nouveau titre de la série Prince Of Persia, développé par Ubisoft Montréal. Dans cette conférence, le producteur Ben Mattes présentera les illustrations du concept initial et les essais de maquettes et expliquera comment les visuels ont évolué au fil des ans. Après, j'aurai l'embarras du choix puisque plusieurs tables rondes en design me seront offertes, portant sur les effets des médias en matière de violence, les jeux et leur signification, le prototypage: conseils et pièges et sur la rédaction. Sinon, le post-mortem du jeu Army of Two pourrait m'intéresser aussi, puisqu'il me permettrait d'en apprendre plus sur la première production de nouvelle génération réalisée par EA Montréal.
Après le dîner, la conférence principale portera sur l'avenir des jeux vidéo. Elle sera présentée par un visionnaire, le britannique David Braben. Il a coécrit il y a plus de 20 ans le jeu précurseur Elite, le premier jeu en 3D réel. Plus récemment, il a supervisé le développement de jeux plus accessibles, notamment Thrillville mais aussi LostWinds, un titre de lancement du service WiiWare. Au cours de sa conférence, il se penchera sur les grands changements qui risquent de façonner la prochaine génération de consoles, notamment des nouveaux modèles d'affaires qui pourraient émerger. Ensuite, je vais me rendre à la conférence de Pascal Luban, un consultant en conception de jeu, qui discutera de la construction d'une vraie courbe de difficulté dans un jeu vidéo. Après, je vais hésiter entre deux conférences, à savoir celle de Patrick Redding, concepteur de jeu sur Far Cry 2, qui se penchera notamment sur le rôle du narrateur dans le contexte de la rédaction de scénario, et celle de Jonathan Jacques-Belletête, le directeur artistique d'Eidos Montréal, qui nous fera part de ses réflexions sur ce qui fait qu'un personnage de jeu vidéo a l'air crédible et réaliste.
En fin de journée, j'irai voir la conférence de Jonathan Blow, un concepteur de jeu vidéo indépendant, qui nous a offert l'imaginatif Braid sur Xbox 360 Arcade. Il discutera du conflit fondamental du design de jeux contemporains. Ce dernier est d'avis que la structure actuelle des jeux ne peut être saine et qu'il nous sera très difficile de produire des titres solides et professionnels au plan artistique. Vous aussi pourriez être présent à cette conférence de clôture puisqu'elle sera ouverte au grand public.
Si le temps me le permet, je vous ferai part de mes impressions de cette deuxième journée en soirée ou le lendemain matin.
par François Taddei
J'ai absolument adoré la conférence principale, qui portait sur l'impact de la violence dans les jeux vidéo. Je recommande à tous ceux intéressé par ce sujet de consulter le site des auteurs:
http://www.grandtheftchildhood.com
Leur étude, financée au coût de 1,5 millions de dollars par le département américain de la justice est particulièrement solide et s'avère très nuancée. C'était un plaisir de les voir démystifier ce débat, dont les véritables origines remontent en 1886, avant même l'avènement des jeux vidéo. J'en reparlerai au cours d'un article plus détaillé prochainement.
Ensuite, j'ai assisté à la conférence de Ben Mattes, qui a bien résumé l'évolution du futur titre de la série Prince of Persia. Je lui ai d'ailleurs demandé pourquoi le jeu s'intitulait ainsi et il m'a répond que c'était pour permettre à la franchise de connaître un nouveau départ, ce titre n'étant aucunement lié aux trois précédents, qui portaient tous des sous-titres. Il a affirmé que l'éditorial d'Ubisoft en France était inquiet de leur direction artistique, que si le jeu plaisais assurément aux japonais et aux européens, il y avait de bonnes chances que les américains de détestent. Le Prince et Elika ont changé d'apparence à plusieurs reprises au cours des trois dernières années. On sera fixé dans deux semaines, lorsque le jeu fera son arrivée.
Le post-mortem d'Army of Two était aussi très intéressant, il m'a notamment permis d'en apprendre plus sur les méthodes de production d'EA. Il était intéressant de comprendre ce qui a motivé le développeur a repousser la sortie du jeu. On nous a d'ailleurs présenté l'outil utilisé par EA lors des focus tests, permettant d'analyser les parties des joueurs et de les rejouer via une vue 2D de haut, afin de déceler plus rapidement les failles en design (ex.: si les joueurs tournent en rond), le niveau de difficulté (si les joueurs meurent souvent).
La conférence de David Braben m'a laissé sur ma faim, il a davantage parlé du jeu Lost Winds que du futur de l'industrie du jeu vidéo. Il a toutefois abordé un des problèmes clé de la génération actuelle, celui du marché de l'usager, sans cesse grandissant et ne rapportant pas du tout aux éditeurs. Il a aussi mentionné que la distribution en-ligne n'était pas l'unique solution, compte tenu que le taux de pénétration des connexions haute vitesse n'est que de 50% aujourd'hui et qu'à peine la moitié des joueurs connectent leur console à Internet.
La conférence de Pascal Luban s'est avéré très technique, mais tout de même intéressante. Il a présenté à l'auditoire des outils pour mesurer la progression du niveau de difficulté d'un jeu. Sa compagnie fait d'ailleurs des audits pour les autres. Vous pouvez en apprendre plus sur son site Web:
http://www.gamedesignstudio.com/
Je n'ai pas regretté non plus d'avoir assisté à la conférence de Jonathan Jacques-Belletête, qui a discuté notamment du photoréalisme, qui est pour certains devenu le St-Graal du jeu vidéo. Alors que les peintres ont longtemps tenté d'imiter la nature humaine dans leurs oeuvres, l'arrivée de la photographie a remis en question cette quête. En effet, puisqu'il est possible de reproduire avec exactitude une personne via une photo, réaliser des portraits réalistes s'avérait moins intéressant. C'est suite à l'arrivée de la photographie que plusieurs peintres ont exploré de nouveaux styles, à l'opposé du photoréalisme (ex.: le cubisme). Peut-être que le même phénomène se produira dans notre industrie.
Somme toute, je suis bien satisfait de cette édition. Je trouve toutefois dommage que le service de traduction simultanée n'ait pas été offert cette année. La sonorisation (ou plutôt l'insonorisation des salles) a été aussi un irritant.
Je ne peux que m'incliner devant le travail fait par les deux conférenciers (Cheryl Olsen et Lawrence Kutner). Une étude développé et qui me semble dès plus neutre. Il est rassurant de voir ce genre d'étude dans un monde où le principal accusé de la violence est constamment le jeu vidéo. Leur site référé par François est un détour obligatoire.
J'ai assisté par la suite à une conférence avec plusieurs panéliste, tous en liant avec la création des jeux vidéo et la majorité venait du Québec. Portant sur l'aspect social du jeu vidéo, Il fut intéressant de voir la vision qu'avait ces concepteurs. Les discussions entre les conférenciers étaient parfois chaotique et ils se sont parfois éloigné du sujet principal. C'est bien dommage car le sujet aurait pu amener plus loin la conférence qui aurait eu besoin de beaucoup plus d'heures pour espérer arriver à quelque chose de concret.
J'ai aussi assisté au post-mortem d'Army of Two. Tout comme François, j'ai pu en apprendre un peu plus sur l'univers EA et la production. On a pu voir les points forts et les points faibles de l'élaboration du jeu. Des idées à retenir, bien que ce soit très théorique.
J'ai été déçu de la présentation de David Braben. Il s'est éloigné du sujet en orientant sa présentation sur Lost Winds, un excellent jeu, certes, mais qui ne me semblait pas approprié. Il a toutefois avancé quelques chiffres et données ainsi que parler du problème de l'échange de jeux usagés. Il a avancé l'idée de l'éventuel disparition des jeux pour ordinateur d'ici 5 ans, une éventualité qui doit être vu avec un bémol, mais néanmoins une possibilité et que l'univers des achats de jeu en ligne devra attendre encore bien des années, étant donné le peu de connexion assez puissante pour gérer le tout. Il a avancé quelques méthodes que l'industrie pourrait adoptée pour assurer un meilleur avenir des jeux vidéo comme baisser le prix des jeux globalement, développé un concept comme quoi les consoles détecteraient les nouveaux jeux et les jeux usagés ou encore ajouter du contenu uniquement pour les nouveaux jeux.
Pascal Luban et la courbe de difficulté m'a été très instructifs. Bien que très techniques, la conférence donnait quelques trucs pour mieux jaugé une courbe de difficulté d'un jeu vidéo ou encore, lors de la création d'un jeu vidéo.
La conférence portant sur Far Cry 2, donné par Patrick Redding, concepteur de jeux chez Ubisoft Montréal, était intéressante. Comment, dans un monde ouvert, s'assurer d'une continuité et d'une histoire captivante, sans pour autant diriger le joueur ? Un défi que Far Cry 2 semble avoir réussit, si on se fit à la conférence puisque je n'ai pas joué énormément au titre pour répondre à la question. Toutefois, la conférence suggérait de multiples façon de s'y prendre, en passant par un intelligence artificiel très développé et en ne prenant pas pour acquis ce que le joueur va faire dans un monde ouvert. Me reste plus qu'à découvrir le jeu pour savoir si les techniques dévoilées dans la conférence ont bel et bien été adaptées en jeu.
La dernière conférence, celle offerte par le très connu Jonathan Blow, était étrangement très métaphysique. Ce créateur indépendant qui nous à offert l'excellent BRAID, à parler de la signification profonde des jeux. Que les jeux de l'époque, étant limité visuellement, offraient une possibilité imaginaire plus grande. Il a démontré certains conflits dans le domaine du jeux vidéo. Par exemple, la progression qui veut faire avancer le jeu dans l'histoire et le jeu en tant que tel qui offre des obstacles ralentissant l'avènement de l'histoire. Aussi, il a ajouté qu'au nom de la jouabilité, les concepteurs étaient prêt à supprimé des points importants de l'histoire pour laisser place à des mécaniques, ce qui va en contradiction pour atteindre un sens profond au jeu, que certaines conséquences dans les jeux ne sont pas réellement des conséquences pour ne pas brîmer les mécaniques du jeu. Ce qu'il visait c'était d'offrir aux jeux vidéo une capacité de toucher les gens, telles les oeuvres d'art le fond. Ça peut paraître ennuyant et surtout complexe, mais la façon dont la conférence se déroulait, c'était très captivant. Jonathan Blow espère que les jeux vidéo vont se détacher du lien qu'ils sont en train de créer avec le cinéma et les livres pour plutôt s'inspirer d'autres types d'art, comme la peinture.
Finalement, le sommet fut presque parfait. Des conférences intéressants, des kiosques amusants, une organisation qui a bien réussit le tout. Puisque cela se déroulait à Montréal, je crois que cela aurait été bien d'offrir des traductions simultanées. Vivement la prochaine année !